Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF/CBAM), qui entrera pleinement en vigueur au 1er janvier 2026, constitue l’une des réformes environnementales les plus structurantes pour le commerce agricole en France....
Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières
(MACF/CBAM), qui entrera pleinement en vigueur au 1er janvier 2026,
constitue l’une des réformes environnementales les plus structurantes pour le
commerce agricole en France. Conçu pour taxer les importations à forte
intensité carbone, il vise à rétablir une concurrence équitable entre produits
européens soumis au marché carbone (ETS) et produits importés dont la
fabrication émet plus de CO₂.
Or, cette mesure pourrait profondément déséquilibrer le marché français
des engrais et, indirectement, celui des produits phytosanitaires.
Un mécanisme coûteux pour les importations d’engrais
La France importe près de 43% de ses engrais,
principalement de pays hors UE tels que la Russie, l’Égypte ou l’Algérie. Ces
engrais, notamment l’urée et la solution azotée, sont très
énergivores dans leur fabrication, donc fortement émetteurs de CO₂.
Avec le CBAM, chaque importateur devra acheter des certificats
carbone proportionnels aux émissions liées à la production de ces engrais.
En 2025, le prix du carbone européen tourne autour de 90 à 100€/t de CO₂,
ce qui représente un surcoût estimé entre 120 et 150 € par tonne
d’engrais importée.
Pour une exploitation moyenne, cela se traduit par un surcoût d’environ
150€ par hectare par an, soit jusqu’à 15 000€ de charges
supplémentaires.
Une compétitivité agricole fragilisée
Les agriculteurs français, déjà confrontés à trois années
consécutives de revenus négatifs, voient dans le CBAM une triple
menace :
Selon le ministère de l’Agriculture, les engrais
représentent déjà entre 6% et 12% des coûts d’intrants agricoles en
Europe. L’application du CBAM pourrait amputer de 0,3 à 0,4% la valeur
ajoutée annuelle des filières agricoles et agroalimentaires européennes.
Effets indirects sur les produits phytosanitaires
Si les produits phytosanitaires ne sont pas directement
inclus dans le périmètre du CBAM, ils seront impactés par ricochet. En
effet, les hausses de prix sur les engrais et l’énergie accroîtront
le coût global de production des cultures, réduisant les marges
disponibles pour la protection phytosanitaire.
De plus, certains actifs chimiques utilisés dans la synthèse des
herbicides, fongicides ou insecticides sont issus de chaînes industrielles
soumises au marché carbone. Leur prix d’importation pourrait donc à son
tour augmenter, entraînant un effet domino sur les coûts de traitement des
cultures.
Une nécessaire adaptation de la filière
Le CBAM pourrait toutefois favoriser une relocalisation
partielle de la production d’engrais bas carbone en Europe et accélérer
la transition vers des solutions à faible empreinte, comme :
Mais ces innovations demandent du temps et des
investissements considérables. D’ici là, le secteur agricole risque de
traverser une zone de haute turbulence économique, rendant urgente
une compensation ciblée pour éviter la désindustrialisation verte du
monde rural.
En somme, la taxe CBAM, bien qu’écologiquement
vertueuse, pourrait pénaliser à court terme la compétitivité agricole
française en amplifiant les coûts d’engrais et produits phytosanitaires,
cœur stratégique de la production alimentaire nationale.
N'hésitez pas à consulter les prix des céréales !